J’aurais tant appréciée garder notre nuit en souvenir, un bon souvenir que je devais malgré tout taire. Les gens savaient combien Hadeys et moi, nous nous détestions, personne ne connaissait les raisons, personne ne savait que nos parents avaient fait une espèce de contrat sur nos têtes, pour que l’ont deviennent mari et femme. Personne n’avait cherché à savoir, à comprendre, parce que nous étions deux fortes têtes, parce que nous ne parlions jamais de nos sentiments, de notre colère. Chez moi, tout n’était qu’apparence, depuis l’enfance, j’étais ainsi. Mais Hadeys avait brisé ce moment qui aurait pu être un bon souvenir. J’avais cherché à m’enfuir, parce que la situation m’avait mise mal à l’aise, Hadeys n’était pas un inconnu, je le côtoyais depuis l’enfance, il avait été mon tyran pendant des années lorsque je n’étais qu’une enfant, et lui un adolescent. Déjà à cette époque, nos petits jeux malsains avaient commencés, et n’avaient plus finit. Mais ce matin-là, il m’avait brisé le cœur, oui, lui que je n’aimais pas, mais que j’allais devoir chérir pour le restant de mes jours, s’était amusé avec moi. J’avais tellement eu cette impression de victoire, alors qu’au final, je n’étais qu’un enjeu, une personne de plus, un objet, un jouet entre ses mains d’expert. Je m’étais fais avoir en beauté, et à présent, je devais ramasser mon restant de dignité qu’il m’avait jeté en pleine tête. Il l’avait eu sa revanche, il l’avait savourer même, il m’avait blessé, comme jamais quelqu’un ne l’avait fait. Même les blessures physiques que mon père pouvait m’infliger, ne m’avait pas fait autant mal que les paroles d’Hadeys. « Si tu croises Lux, dis lui qu’il a perdu son pari ! » J’étais restée là, à le fixer, le visage fermé, les yeux noirs, je n’étais pas en colère, il m’avait juste blessé, mais de l’extérieur, on aurait presque pu croire que je m’apprêtais à lui trancher la gorge. Finalement, j’avais tourné les talons, et m’était enfuit, me débattant avec mes cheveux, essayant de ravaler mes larmes, au moins, jusqu’à mon dortoir, où je pu laisser éclater mes faiblesses, ces larmes que j’avais tant retenue depuis des années. Mes colocataires n’étaient pas là, heureusement, je ne voulais pas qu’ils me voient dans un état aussi déplorable.

Les jours avaient finit par passer, les arbres étaient nus, ce qui voulait clairement dire que l’hiver était présent, jusqu’aux premières chutes de flocons. Je l’avais ignoré, comme si il n’existait plus, je passais près de lui, la tête haute, sans lui adresser le moindre regard, si il venait à vouloir me parler, je l’ignorais, ou je finissais par m’enfuir. Je restais la même, avec le cœur un peu plus douloureux que d’habitude. Je voulais le blesser comme il avait pu le faire. Mais je ne comptais pas parler de Lisbeth ou d’une quelconque autre faiblesse, non, ces choses étaient passés, je mettais amusé un moment avec cela, à présent, je devais trouver autre chose. J’aurais très bien pu me concerter avec Lucy et Lisbeth, mais devoir leurs dires que j’avais couché avec Hadeys, qui se trouvait être l’ex de Lisbeth, et avouer ma défaite, c’était un sentiment bien trop gros pour devoir en parler. Je me sentais stupide, et plus les jours passaient, et plus ma colère augmentait un peu plus. Je voulais le faire souffrir, lui broyer les os, lui arracher le cœur, lui donner du poison, lui trancher la gorge, ou le faire souffrir grâce à un sortilège impardonnable. Histoire de le voir à nouveau fléchir sous mes yeux. Mais malgré ma haine qui avait décuplé envers sa pathétique personne, je devais mettre ma rancœur de côté, et profiter des festivités à l’approche de Noël. Objectif : Le Pré-au-Lard. Ma stupide mère qui était en voyage avec mon père, souhaitait que je ramène quelques petites choses du Pré-au-Lard, comme si je n’avais que cela à faire. M’emmitouflant dans mon duffle-coat noir, entourant mon cou d’une large écharpe aux tons violet, je mettais diriger vers le Marché de Noël avec Lucy et Lisbeth, avant de les abandonner, et de m’arrêter à la première brasserie, histoire de rester au chaud, et d’éviter toutes maladies. Mais alors que je venais de passer la porte, mon regard se stoppa sur une personne. Hadeys. Si j’avais suivis mes habitudes, j’aurais fais demi-tour, et serais parti boire un verre de vin chaud, à l’extérieur, parmi mes rares amis. Mais je n’en fis rien. Je ne pouvais pas le fuir pour toujours, surtout si nos deux familles venaient à s’unir par notre mariage.

Déposant mon manteau sur le dessus d’une chaise du comptoir, j’avais pris place, avant de me commander une boisson chaude, histoire de réchauffer mes mains rosies à cause du froid – j’avais oublié mes gants sur mon lit. Mais alors que je pensais être tranquille, malgré sa présence, le jeune homme vint à ma rencontre. L’homme posa ma boisson en face de moi, boisson que je pris immédiatement entre mes mains, pour boire une fine gorgée. Je ne lui parlais pas, il ne me parlait pas. Mais j’avais pris la décision de briser la glace, un sourire espiègle sur le visage. « Hadeys. » À vrai dire, je n’avais rien trouvée de mieux, parce que ma rage envers sa personne s’était soudainement montré, au moment où il avait prit place à mes côtés. « Mes parents veulent que je t’offre quelque chose pour Noël. » Et c’était le cas, visiblement, eux se chargeaient d’un cadeau pour la famille Xilias, mais moi, je devais m’occuper de trouver un cadeau pour ce crétin. « Un cœur, ça serait parfait pour toi. » Attrapant mon manteau, j'avais finit par farfouiller dans ma poche, pour sortir de la monnaie, pour la boisson que j'avais prise. Je ne comptais pas m'attardée ici, non, me retrouver dans la même pièce que ce crétin, me donnait soudainement envie de… vomir. Me levant de ma chaise, j'avais attrapé mon manteau et ma grosse tasse, pour aller prendre place à la table de Ruben, un ami d'enfance. Bien que nos conversations n'avaient été que très évasives jusqu'à présent, je savais que c'était le seul moyen pour qu'Hadeys me fiche la paix, ou en tout cas, je l'espérais. « Ca ne te pose pas de problème que je m'installe avec toi ? » Mais je ne lui avais pas laissé le temps de réponse, puisque je m'étais déjà sagement installé, un fin sourire sur le visage, fixant Ruben.

Aujourd'hui fut un des rares jours où mes pensées me ramenèrent vers mon enfance. Avant le divorce de mes parents, avant la découverte du secret de ma mère. Et surtout avant ma déchéance. Mes souvenirs me ramenaient sans cesse vers trois visages. Trois visages qui avaient complètement gâchés ma vie. Ma mère Isaya, toujours présente, douce, attentive. La mère parfaite en dehors du fait qu'elle m'avait caché le fait d'être une cracmol. Et malheureusement ce secret avait brisé notre entente. L'enfonçant dans la névrose tandis que je sombrais lentement dans un cynisme dès plus cassant. Le deuxième, Hadeys Xillas. Il avait été pareil à un frère, c'était incontestablement mon meilleur ami. Je lui confiai tout, nos journées n'étaient que jeu et farce tandis que nos différences s'accordaient à merveille. C'est certainement lui que je regrette et hais le plus au final. Combien de fois aurais-je eu besoin de lui après le divorce ? Beaucoup, beaucoup trop de fois. Son absence est un trou dans ma poitrine, trou que j'ai bourré de haine et rancoeur. Je me suis juré de lui faire payer ma douleur et il sait que je tiens toujours mes promesses. Et enfin le troisième. Eliana Sparkles. Mon ancienne princesse, celle qui était censée devenir ma reine. Je l'ai désirée, je l'ai repoussée, je l'ai aimée et je l'ai hai. Sur son visage, je pourrais mettre des dizaines de sentiments, je suis passé par tout avec elle et le dernier en date contient deux mots. Séduction et vengeance. Parce qu'ils m'ont poussés au pied du mur, parce qu'ils m'ont enlevés mon monde, rabaissé au rang de jouet abandonné, ils paieront et très chers.
Ce jour-là, je me rappelai donc de la douleur de ma déchéance et incapable d'effacer les images qui me tourmentaient depuis des années, je décidai d'aller à Pré-au-Lard. Seul. La compagnie des autres avait tendance à me renfermer sur moi, méfiant trop méfiant pour pouvoir être un ange, je préférais rester loin de toute compagnie, perdu dans des souvenirs bien trop clair. Il est bien connu que mes vengeances sont dès plus douloureuses et mon intolérance a tendance à faire reculer les gens. C'est certainement pour cela que je me suis retrouvé à Serpentard plutôt qu'à Serdaigle d'ailleurs. Les arbres étaient nus et mon regard myosotis s'accrochait sans cesse à la fine couche de neige. Je ne pus m'empêcher de pousser un énième grognement tandis qu'un coup de vent venait coller mon écharpe contre ma bouche. Noël approchait à grand pas et pourtant je n'arrivais toujours pas à me réjouir. Cette fête je ne l'avais jamais beaucoup aimé. Entre un Noël chez mon père que je passais seul et un autre chez ma mère où je la regardais se droguer. Une mère est censée protéger son fils non ? Et bien ce n'était pas le cas de la mienne. Et il était hors que question que je lui montre une onde de compassion. L'ange que j'avais été avait définitivement disparu avec mon monde royal. Les enfers avaient repris leur place et moi, moi je m'étais pommé. Comme toujours.

Me glissant lentement dans le Marché de Noël bondé, j'errais sans aucun bute précis autre que me remplir la tête de chansons de Noël et d'image de joie qui m'empêcheraient de penser à mon enfance. Cependant, cela finit vite par m'agacer tandis que ma tête se repassait « Vive le vent » inlassablement. Rien de mieux que le monde pour une mémoire photographique. Même si les migraines prennent souvent le déçu par la suite. Assis à une table dans une brasserie, je serrais la boisson chaude entre mes mains, le visage toujours aussi impassible tandis que je voyais les gens défilaient. Parmi eux, Hadeys. Un rictus de haine apparut sur mon visage d'une pâleur morbide. Il crèverait cet abruti, oui il crèverait. Je ne pouvais détacher mon regard de sa tête arrogante et des plans plus cruels les un que les autres me vinrent à l'esprit. Arriva enfin Eliana qui se posa à côté de lui. Ces deux-là se disputaient depuis l'enfance, petit cela m'amusait et je faisais tout le temps l'arbitre, préférant observer leur jeu plutôt que d'y participer. Je n'entendis qu'une seule et unique parole que la douce proféra : « Un coeur, ça serait parfait pour toi. » Un sourire moqueur se dessina lentement sur mes lèvres décidément nous avions eu la même pensée. La Serdaigle finit par quitter la table et ce fut avec surprise que je la vis approcher de moi. Surprise que je cachais sans aucun mal bien évidemment. Avec Eliana c'était toujours compliqué. Je la haïssais, mais ne le montrais jamais, préférant jouer de ma relation encore assez présente pour énerver Hadeys.
« Ca ne te pose pas de problème que je m'installe avec toi ? » Un sourire froid, un regard vers mon ancien meilleur ami et avant même que je n'hoche la tête, elle s'assit. « Alors... Des problèmes avec ton prince charmant Eliana ? Cet abruti est devenu encore plus stupide ? » Mes paroles, déjà un peu plus enjoués restaient moqueuse tandis que j'ignorais royalement Hadeys non loin de nous. Je souris puis lui murmurai d'une voix suave. « Quoique non. Etre plus stupide est complètement impossible. »