« Tu sais ce que cela fait de te voir traîner avec… lui. » cracha l’homme blond d’une taille plutôt respectable, ses yeux sombres ancrés dans les prunelles azur du professeur de tortures qui esquissa l’ombre d’un sourire moqueur, ses mains venant paisiblement s’enfoncer dans les poches de son pantalon, sa cape à l’intérieur verdoyant des myriades de prairies bordées par une nuit sans fin, murmure insipide de la ténébreuse maison qui avait été autrefois la sienne du temps de ses jeunes années à l’école de Poudlard. « Ne l’approche plus Valdis. » recommandation qui fut glissée d’une voix sourde, presque éteindre, qui le laissa expier un rire presque trop sincère pour ne pas en devenir sinistre devant les lèvres desquelles il s’extirpait paisiblement.

Sous une violence rare, d’un venin brûlant ses veines avec passion, amante mesquine dont les lèvres venaient border sa gorge, longer sa nuque de ses mains lascives… invasives, qui dérivaient sur sa peau, léchant chaque parcelle de ses bras, de ses mains… Ses muscles se bandant sous une facilité brumeuse, ses doigts se refermèrent vivement sur sa gorge alors qu’il le plaquait contre le mur de la ruelle, tandis que les autres dardaient une lame à auteur de sa gorge, poignard pieusement dissimulé par sa propre silhouette qui se dressait dans la ligne de mire de n’importe quel passant sous leur proximité narquoise. Tandis que l’agressé venait d’effectuer l’ombre d’un geste avec sa baguette, l’autre main refermée sur le bras de l’attaquant, forçant Samuel à accentuer sa prise et la pression de ses doigts, de sa lame qui entailla la chair d’une manière presque infime, mais laissant une larme pourpre s’insinuer sur le tissu blanc de la chemise de l’inconscient.

« Si tu te crois plus rapide qu’une lame… ou qu’un poison, je t’en prie. » railla-t-il tandis que ses lèvres se fardaient d’une sorte de grimace venimeuse…

Peut-être était-ce son véritable visage au fond, celui d’un être que le remord n’étouffait pas, ayant déjà tué, torturé, et qui prenait plaisir à ce jour à faire de même avec ces élèves qui dépendaient plus ou moins de son bon vouloir. Elèves qui devaient alors sinuer dans les rues de Pré-au-Lard… mais bien plus loin, pas par ici, alors qu’ils se tenaient dans une ruelle derrière la Tête de Sanglier. Et mentait-il au sujet de cette seconde menace qui dériverait alors parmi ce fluide rubescent qui pleurnichait le long de sa gorge qui avala avec difficulté une gorgée d’une salive bien trop fastidieuse… A vrai dire, celui qui sentait le contact glacé sur sa peau n’avait guère l’envie de prendre le risque de mettre sa parole en doute, peut-être parce qu’au fond, il l’avait déjà vu agir auparavant, acheter des herbes et autres choses interdites dont on ne faisait pas d’autres choses qu’un poison, parce qu’il se doutait des cadavres qui se trainaient laborieusement à sa suite dans cette venelle boueuse, presque inconvenante.

« Ne me donne plus jamais d’ordres Rowen. Jamais. Je sais très bien ce que je fais, et si tu remets ma parole en doute, si tu fouines dans mes affaires… je regretterais d’avoir à expliquer à Woodwolf pourquoi il devra se passer des services d’un bon sorcier.
- Justement, le ministre…
- Me fait confiance. Tache d’en faire autant. » ponctua-t-il en le relâchant, l’une de ses mains venant tapoter la joue du blond.
« Et toi ne me tourne jamais le dos. » cracha ce dernier avec un peu trop de vigueur, tandis que Samuel essuyait déjà la lame de son couteau dans un mouchoir comme s’il effleurait le visage d’une femme et qu’il ne désirait pas lui faire de mal, ses prunelles revenant se jucher sur les traits de Rowen qui le fixait avec une colère parfaitement perceptible. Avant de glisser l’une de ses mains dans la petite bourse qui pendait à sa taille et d’en extirper une fiole d’une rouge cireux qu’il lui jeta, l’autre la saisissant.
« Tu devrais éviter de faire trop de zèle, la prochaine fois ça pourrait se retourner contre toi. Maintenant va-t-en. » répliqua-t-il en le regardant avaler l’antidote au poison qui souillait la lame qu’il rangeait prudemment à présent dans son fourreau, ses doigts de toute manière protégés par les sombres gants qui recouvraient ses mains.

Le blond s’extirpa de la ruelle en jetant la fiole avec dédain… fiole qu’il ramassa pour la replacer paisiblement dans sa bourse d’origine, tandis que l’autre passait devant Hollow en lui jetant un regard mauvais, ses doigts venant ramper sur l’infime blessure qu’il portait à sa gorge. Oh ils se connaissaient également, Rowen faisant parti du ministère, mais il ne faisait aucun doute que ce dernier ne portait pas l’auror dans son cœur, ni même dans son estime… Ce ne fut de toute manière que quelques secondes plus tard que Samuel paraissait au grand jour, ses prunelles se déposant sur son ancien collègue et ami… qu’il conservait dans un désir, certes peu louable au fond… mais ils s’entendaient bien de toute manière, non ?

« Une petite mésentente, rien de bien grave. » lâcha-t-il en guise d’explication, sans savoir pourquoi Teagan était venu jusqu’ici… certes, Rowen était intervenu avant qu’il ne puisse aller le saluer, mais de là à venir jusqu’ici, il y avait trop de données imprécises dans cette équation, qu’il en restait néanmoins méfiant, sans doute pour rien, mais il était ainsi. « On va boire un verre aux trois-balais, et tu me diras ce qu’il se passe de nouveau dans le monde ? Poudlard est une véritable prison. » ajouta-t-il en esquissant l’ombre d’un sourire moqueur, tout en s’engageant déjà sur le chemin du pub… qui n’était pas bien loin étant donné la petitesse du bourg.

C’était comme effleurer le souffle caverneux des ténèbres, juste d’un frôlement taciturne de ses lèvres… murmure oppressant du poison qui parsemait encore et toujours la lame qu’il avait dissimulée à sa taille un peu plus tôt, dans le creux de son fourreau le protégeant de sa propre mesquinerie, et de ses diables aux effluves bien trop pernicieuses. Comme un dialogue avec le démon, sa suspicion rampait sur sa peau, léchant ardemment chaque millimètre à la saveur salée de sa chair, comme s’il pouvait presque saisir les paroles susurrée par la mort, son amante, sa diablesse, celle qui venait se repaître de la douleur avant que les âmes ne lui parviennent enfin. Il n’était certes pas le meilleurs assassin, ses pas ne s’immolant que dans une quantité vulgaire de sang comparé aux venelles d’autres êtres, mais le peu de ses crimes auraient pourtant suffit à l’envoyer à Azkaban, voir à lui offrir ce baiser redouté, celui de l’amour capricieux de détraqueurs souffrant d’une faim insatiable et brûlante.

Il était un criminel, un assassin, un dangereux… psychopathe, mais les mots écorches vos lèvres trop invasives, se faisant coudre dans la torpeur de la croyance qu’il n’était peut-être pas aussi… Pas aussi ? Non, il était ce monstre, violent et insatiable, l’enfant désabusé qui se nourrissait de la douleur des autres pour étouffer la sienne, inclinant pourtant le visage sous la douce caresse des doigts envieux de son épouse, sa douce éternité… pieuse malédiction qui étreignait son âme d’une maligne manière. Et si Poudlard était une geôle comme il venait de l’affirmer, peut-être était-ce par l’avancée de sa propre nature, de sa propre existence, ne le laissant plus jamais souffrir d’un quelconque manque monétaire, ni peut-être même sentimental, car elle avait tenu à le suivre dans l’enfer de sa nouvelle position, de ses nouveaux méfaits.

Prenait-elle seulement conscience des ténèbres vaporeuses, mais pourtant vibrante qui croupissait, languissant du retour de leur amant de fortune, baisant ses lèvres, sa nuque, son ventre, ses reins… juste pour le convaincre de ne jamais céder à une quelconque menace venant d’autrui… comme si quelqu’un pourrait jamais retenir sa main, ses doigts sous leur indéniable habitude d’enjoindre la douleur. Alors que d’autres les connaissaient mille fois plus doux, même Liliane en bénéficiait sous l’intolérable séduction qu’il dirigeait à son encontre, et il n’hésiterait pas à aller bien plus loin si cela s’avérait nécessaire. Ashka frémirait si elle l’apprenait, et Merlin seul savait à quel point il n’y ressentirait… rien ? Mensonge et damnation, frondeuse déraison que l’ironie d’une telle ‘vérité’. Il était homme, soumis aux pulsions charnelles comme tout un chacun, frileuse malédiction provenant sans doute d’un ancêtre ayant déçu les Dieux.

Ainsi… cela ne faisait que quelques jours mais les choses s’érigeaient… presque blafarde au fond, et il n’était plus en mesure de côtoyer qui il souhaitait, et puis, qu’avait-on pu raconter à son sujet à présent qu’il laissait l’ombre narquoise de son attitude se montrer plus fidèle aux ténèbres lancinantes qui s’immolaient dans les tréfonds de son être depuis des siècles entiers paraissait-il. Peut-être au fond avait-il pactisé avec le Diable le jour où le lustre était tombé, laissant du sang s’abîmé sur ses traits, le reflet d’un soulagement, d’un plaisir, venant étreindre sa personne alors qu’il aurait dû. Aurait-il pleuré un monstre ? Son monstre qui l’avait hanté tant d’années durant avant que celui-ci ne se déforme sous l’apparence d’une crainte bien différente, brisant l’influence de cette mère qui ne séjournait plus à présent que dans sa terrible tombe.

Non… Poudlard avait été sa maison à plus d’un titre, son manoir, le laissant retrouver le parfum presque cireux des cachots où l’humidité paraissait presque moisir depuis des temps immémoriaux sans que nulle trace visible de ces âges soit réellement perceptibles. Et il l’aimait à la manière du souvenir fugace de sa perversion… mais le pire s’était déroulé à l’extérieur, les meurtres, sans cesse, n’avaient trouvés d’existence que dans des demeures, un ministère, un parc… l’odeur entêtante d’un feu, les flammes crépitant sournoisement, dévorant des vêtements tâchés de sang, preuves bien trop directes de ce qu’il avait alors pu faire. Car le plus injurieux des poisons était capable de liquéfier des organes à une vitesse abrégeant presque trop vite la souffrance… l’étouffement brutal que l’on y ressent.

Ainsi… qu’avait donc découvert Teagan à présent qu’il n’était plus dehors, qu’il ne pouvait veiller sur ses propres affaires de la même manière qu’autrefois ? Certes, il pouvait sortir… même revoir certains compagnons et autres personnes, mais ce n’était plus pareil. Comme en cette seconde par exemple, alors qu’il le suivait également, se dirigeant vers ce pub qui n’attendait sans doute plus qu’eux. L’agitation des élèves qui se précipitaient vers le marché de noël le rendait presque malade, tellement éloigné de ces festivités qu’il trouvait quelconque, le rendait presque certain que les Trois Balais seraient plus ou moins vide à cette heure, ne dissimulant plus le brouhaha, mais ne risquant pas non plus de l’y faire rencontrer des élèves… apeurés.

Il avait déjà bien trop à faire en ce qui concernait de savoir, de découvrir, si Teagan avait finalement ouvert les yeux à son sujet. Ce fut sous cette insidieuse préoccupation qu’il pénétra en sa compagnie dans le pub qui fut, comme il s’y attendait, très légèrement rempli, la table qu’ils avaient autrefois l’habitude d’assiéger, aussi libre que l’air, et à laquelle ils prirent place. C’était presque comme remonter le temps, se laisser porter par l’étrange torpeur du passé, mais les choses… avaient-elles réellement changées ? Bien sûr que oui, les mains se tâchaient d’actes et d’actions, de décisions, de positions, tout ayant un sens, et si le jeune auror pouvait savoir à quel point ceux qui le conseillaient de s’éloigner de Samuel avaient finalement raison, peut-être ressentirait-il ce fielleux goût de trahison s’échouant sur sa langue devenue pateuse.

« Quelque chose à boire ? » demanda subitement celui avec lequel il venait de prendre place, sortant quelques pièces de sa poche… diable, il aurait pu payer, voir même acheter ce bar si cela avait été dans ses intentions.
« Un verre de Xérès, cela reste la seule boisson acceptable de cet établissement selon moi. Dire qu’autrefois on devait se contenter de Bièraubeurre… et décidément rien n’a changé. » souffla-t-il sous l’éclat d’un sourire amusé, presque taquin au fond, comme s’il recherchait bel et bien l’éclat du passé à ses côtés, tout en restant attentif à ce qu’il pourrait lui glisser, chaque parole ayant son importance… l’un et l’autre le savaient après tout, c’était presque gravé dans leur chair. « Tu ne vas pas que me payer à boire j’espère… même les aurors ont le droit de boire. »